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Une plume, des mondes
28 août 2013

Plume d'Encre ~ La souffrance

Therru a aimé par la suite, passionnément. Un magicien d'abord, puis un moine, avec lequel elle a lié sa vie, oubliant tous ses voeux d'abstinence et de solitude. Pourtant, les relations ne durent parfois qu'un temps, et lorsqu'elle changea de vie, abandonnant l'épée et le heaume de la paladine qu'elle était devenue pour la robe des mages, elle se retrouva seule. Il la quitta, pour d'autres horizons, d'autres beautés. 

 

 

 

Vivre.

Une seule chose importe, une seule idée compte.

Oublier son visage,

Oublier ses mots doux,

Oublier son image qui encore me hante.

La nuit, possible tombeau de ces fantasmes impurs ravive au contraire les plaies encore trop vives qui déchirèrent mon cœur. Onirisme exacerbé transcende les émotions de folles étreintes pourtant si chères à mon cœur.

Froid.

Invariablement, glace envahit mon cœur quand la chaleur de son corps s’évapore au profit d’une autre, plus belle, plus sensuelle, plus rebelle.

Adieu amour alors pour la sage demoiselle qui par trop romantique s’inflige bien des maux. Elle pleure, elle crie, dans le noir elle appelle mais seul le long silence répond à ses sanglots.

La couleur de sa flamme a perdu sa chaleur. Bleue comme la teinte de sa peau quand, glacée, elle quitte sa couche. Bleue comme les lacs où ses larmes se perdent, goutte de sel errant dans une mer de douceur. La douceur justement…

Quelle émotion lointaine, quel déchirant souvenir !

Quelle douceur existe pour une âme en peine, pour un esprit sans cœur ?

Pendant des jours, je me privais de boire. A quoi bon, puisque l’eau ne semblait servir qu’à alimenter mes yeux sans cesse humides ?

Malgré ma douleur, je tenais trop à l’étincelle de chaleur au fond de mes yeux, à l’espoir d’un avenir pour me laisser ainsi dépérir. J’ai vécu tant de femmes bien plus fortes que moi, archère, guerrière, moniale ou paladine. Des femmes puissantes et fières qui succombèrent aussi au doux attrait de l’amour pour avoir à leur tour le cœur brisé. Pourtant, chacune y avait cru, et aujourd’hui, j’y crois encore.

 

Atteindre l’horizon qui au loin se profile…

Fuir nos amours perdues !

Fuir notre vie ensemble !

Alors que dans les bras d’une autre il se repose, mon âme toujours en soupire en souvenir. Las, pourquoi dame nature ne m’accorda-t-elle pas minois plus gracieux ? Mes mains possèdent un don, le pouvoir coule dans mes veines, mais ils flétrissent le visage de celle qui les revendique. Assoiffée de connaissance, j’y travaillais par trop, grimoires incantations sur parchemins miteux et sortilèges peuplent le sol de mon repos. Cernes et traits tirés récompensent ce dur labeur, tandis que j’y passais les plus belles heures de ma jeunesse.

J’ai voulu tout oublier, quitter cette magie qui m’a ensorcelée, aspirant peu à peu la vie qui peuple mon corps si gracile… Il me convainquit de continuer dans cette voie qui me faisait rayonner selon lui, voie que j’avais choisie et dont je devais m’acquitter.

Alors je le perdis.

 

Ne pas pleurer encore !

Mes yeux désormais secs posent sur le monde un regard nouveau.

Croire en mon avenir !

Croire en mes possibilités !

Si j’ai été élue pour mener cette quête, le destin a bien quelque chose à me donner. La souffrance nécessaire qui a brûlé mon corps ne peut être que l’épreuve qui me destine à un avenir grandiose !

Alors que je m’affirme peu à peu comme cette entité désincarnée qu’il fit de moi en broyant mon cœur entre les mains de la trahison, le retour à la vie semble s’amorcer. J’ai brûlé bien des souvenirs pour apaiser ma conscience, mais mon âme reste encore pleine de ses réminiscences d’un passé plus heureux.

Et pourtant l’était-il ? Etais-je bien moi-même dans cette comédie amoureuse qu’il me fit jouer, jour après jour, heure après heure, réprimant mes envies de douceur et d’attention en trouvant les excuses pour pardonner à son esprit vagabond et insouciant ? Combien j’ai pu me mentir à moi-même dans cette farandole que je croyais mon bonheur ! Combien le voile aveuglant des habitudes bien installées trompa ma perception ! Jeune fille naïve malgré toutes mes vies passées, le besoin d’être aimé fut plus fort que la raison, et je m’abandonnais sans retenue dans cette relation pourtant si imparfaite qui fut la notre…

 

Calme.

Retour à l’équilibre.

La douleur bien sûr demeure au niveau du cœur, mais la respiration se fait plus régulière, tandis que l’idée fait jour en moi que mon bonheur doit passer par d’autres chemins. Lentement, l’aile douce de la paix caresse mes pensées tandis que je regrette mes actes passés. Quelle folie de retourner contre lui ma magie pour lui brûler le dos ! Remercions le ciel que mon errance ne fut que momentanée ! Je quittais les lieux avant de finir ce travail si tragique, laissant à sa bien-aimée le soin de panser les dégâts d’un animal blessé acculé à sa propre raison.

L’instinct me guida pendant plusieurs jours tandis que mon esprit avait déserté ses quartiers, se recroquevillant loin de la peur trop amère qui émanait de ma poitrine. Peur d’être seule, peur de ne pas retrouver un jour un amant plus doux ou plus tendre qui soignerait bien ces plaies encore trop vives.

 

Sommeil.

Des nuits sans repos. Mon corps ne supporte plus sa charge, et dans un nouvel oubli réparateur, il veut s’abandonner. Allongée dans une clairière, le regard plongé dans les étoiles, mon esprit s’éteint peu à peu sur cette vision mirifique, rejoignant pour un temps le savoir de ses ancêtres avant de retourner dans quelques heures à sa basse condition mortelle.

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