Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Une plume, des mondes
30 août 2013

Feleth ~ L'oublié

Texte écrit pour le forum de role play Feleth. Les Seïrdans sont des démons imbus d'honneur vivant dans le Veïn, un monde en changement perpétuel et infini. Les Vampires sont des Seïrdans exclus de leur race du fait de leur lâcheté. Le monde entier de Feleth a été imaginé par Le Violoniste. 

 

 

Les âges s’étirent lorsque la vie n’a plus de prix. Les buts s’étiolent peu à peu jusqu’à n’être plus que poussières d’intérêts aux confins de l’intelligence. Pourtant, l’existence avait un sens, autrefois, mais il s’est perdu dans les méandres d’actions peu glorieuses... Et lorsque la mort frappe à la porte, les pensées s’éparpillent sur un bilan qu’on regrette, qu’on déplore, mais qu’on ne peut changer. 

Les brises soufflent sans grande conviction sur les plateaux de lune. Le brouillard demeure pourtant, lourd, enveloppant chaque ombre d’une fantomatique apparence, ce qui rend les lieux à tout le moins inquiétants voire carrément terrifiants. Les êtres qui y vivent néanmoins ne s’émeuvent pas de ces conditions climatiques et aiment à se fondre dans cette blancheur nacrée afin de disparaître pour un instant ou pour toujours dans son irréalité diaphane. 

Croiser de longues dents est une affaire courante pour laquelle il vaut mieux espérer tomber sur une paire de longues dents repue, ce qui s’avère en pratique compliqué tant ces autochtones ont appétit pour les choses pulsant de vie. Parfois pourtant, un être différent émerge de ces brumes. Il erre depuis si longtemps que nul ne saurait s’il est bien réel, mais des rumeurs sans cesse renouvelées courent toujours sur son compte, laissant présumer qu’il n’a pas arrêté de fouler ces lieux. Sa peau plus pâle encore que toutes les blancheurs existantes dérange. Ou bien sombre-t-elle peu à peu dans la noirceur ? Son regard d’argent en fusion semble pénétrer aux confins de notre intimité, découvrir toutes les facettes de notre personnalité, tous nos secrets avant même de nous laisser le temps de prendre la parole.

Il est vampire. L’est-il vraiment ? 

Nul ne connait son histoire. Ses dents s’ornent du physique naturel à la race, pourtant jamais nulle trace de sang n’a pu être visible au coin de ses lèvres. S’il glace, c’est par sa prestance plus que par sa capacité à vous considérer comme proie, et son vocabulaire vous arrête suffisamment longtemps pour qu’il fasse de vous ce qu’il désire... Sans que jamais pourtant nul n’en ait pâti... Du moins est-ce ce que l’on dit... Et si nombreux sont ceux qui le racontent que la tendance pousse à les croire.

Qui est-il ? 

Je le sais. 

Son nom importe peu. Il ne retracerait rien de son parcours, ceux qui l’ont connu l’ont de plus banni de leur mémoire.

Il est né en d’autres terres, bien loin d’ici. Un monde de changement perpétuel, de folie et de démence, de couleurs et de grisaille, désespoir, dépendance et désarroi. Il grandit les armes à la main avant de savoir même marcher, les lames qu’on lui forgea demeurent ses compagnes les plus fidèles. Fiables elles au moins. L’honneur, belle notion que l’on lui inculqua à grands renforts de triques et de coups jusqu’à ce qu’il en vienne à pleurer. Humilité était alors acquise, la vie pouvait commencer.

Les rencontres de l’existence sont telles qu’il est impossible de prévoir à l’avance lesquelles seront bénéfiques. On s’éprend de certains, réprouve d’autres sans savoir quel choix sera le bon. Mais il faut vivre, nos actions décident pour nous de l’avenir qu’elles dessinent... A croire qu’il a choisi la mauvaise voie.

Elle était si attirante... Un physique assez banal, mais un charme incroyable, et dès les premiers mots qu’ils échangèrent, il fut conquit. Décrire les banalités des sentimentalités qui s’ensuivirent n’est d’aucun intérêt. Il en était fou.  

Leur couple étonnait, dérangeait, mais il existait bien pourtant. Le scepticisme régnait de la dépendance créée entre deux êtres d’une race pourtant solitaire, mais l’amour présidait à cette association avec une force peu commune. Jusqu’à ce qu’elle flanche. Il la sentit vaciller. Il tenta de l’épauler. Il échoua. Elle s’éloigna, jour après jour, heure après heure, à des considérations bien peu honorables. Il n’en savait pas tout mais la sentait dépérir au fil du temps.

Une nuit, un jour, en un moment dont les circonstances ne sont plus claires dans son esprit, elle lui fit promettre. Elle avait disparu des environs des jours durant, pour une destination qu’il soupçonnait à défaut d’en être sûr. Elle l’implora de jurer que jamais, il ne laisserait salir son nom. Que toujours, il serait là pour la protéger, pour protéger sa réputation, pour que jamais elle ne fasse honte à sa race. Fou, il promit. Elle sombra peu après à la décadence d’un monde qui n’était pas le sien.

Cette folie qui rongeait son être, cette démence qui étreignait son corps venait du sang. Elle aspirait à ce fluide, elle en demandait toujours plus, mais poussait les limites jusqu’à s’en abreuver. Il devint vital. Elle sombra. Maladie. Magie. Aberration ? Il ne comprit pas. Il avait entendu parler d’autres rejetés. De lâches et de couards, mais ce régime alimentaire étrange ne faisait pas partie des symptômes pourtant. 

Un jour il la trouva dans un état d’agitation plus extrême encore que d’habitude. Voilà des jours qu’elle n’avait pas repu sa soif, et même son contrôle sur elle-même si puissant développé au fil des siècles ne suffisait plus. Elle allait commettre une folie. Ils ne pourraient continuer à le cacher. Elle se trahirait, son nom serait trainé dans la boue. Il faillirait à sa promesse. 

Dans la nuit, elle lui échappa. Il s’en rendit compte rapidement mais pourtant trop tard... Un corps roide ornait le salon sur lequel une chevelure de neige était penchée. Elle buvait.

Il en était assez !

Il devait agir !

Elle ne comprit pas. Ou peut être que si ? Ses yeux se refermèrent sur l’image de son bien aimé tandis que sa nuque la faisait souffrir, tellement souffrir... Brisée nette. Le reste ne fut que magie et habileté. Ses lèvres pulpeuses, sa gorge nettoyées de toute trace de sang. Ses canines pointues discrètement dissimulées sous un sortilège éphémère, tandis qu’il allongeait les siennes de même manière. En quelques instants, il devenait le coupable idéal d’une telle barbarie, et nul ne pouvait douter de son massacre.

Les mâles arrivèrent au petit jour, découvrant le macabre spectacle. Au nombre de deux. Ils l’attrapèrent, tandis que sur leurs lèvres déjà courait un mot qu’ils avaient appris sur les terres du milieu. Une aberration de leur race qui se développait loin de l’abri du monde fou qu’ils chérissaient tant. Vampire. Monstre issu de la lâcheté.

Vampire. Honte d’un peuple fier.

Vampire. Banni...

Il se laissa conduire. Il ne protesta à aucun moment. Digne, il supporta en silence les fruits de son action. Vampire il était devenu. Vampire on le croyait. L’exil était la seule échappatoire qu’on lui offrait, ses camarades se refusant à donner la mort à l’un de ceux qui avait tant de fois combattu à leur côté. On voulait l’oublier. Le rayer définitivement de ce monde. Ne pas faire de lui le martyr que quelques dissidents déjà attendaient...

C’est comme ça que j’arrivais sur Feleth, sur les plateaux de lune. Par amour. Par honneur. Par conviction. 

Depuis, elle n’a pas quitté mes pensées un seul instant, et pas un seul instant, je n’ai regretté ce que j’avais fait. Elle demeure érigée en héroïne, je suis le banni. La souffrance n’atteint pas un coeur rodé par l’âge aux mesquineries du mépris. Je ne suis pas un vampire. Je ne sais me repaître de sang. Pourtant le sortilège un jour lancé demeure toujours. Pourtant je n’ai pas quitté ces plaines. 

Le châtiment fut juste. L’attachement est proscrit pour ceux de notre race, nul ne peut le braver, rien ne peut changer cet état de fait. Solitaires. Solitaires et dangereux. La folie est inscrite dans notre sang plus sûrement que la magie du Vein elle-même. 

Pourtant jamais je n’ai éprouvé telle fierté à être peuple de ma race. 

Je la déteste et la vénère.

Je l’abhorre et la glorifie.

A l’aube de mon trépas, je lance aux yeux du monde la vérité.

Souffle aux creux des vents. Chants le long des brises. Bruit. Murmure.

Seïrdan...

 

Mel'Dessin d'Afra (ses travaux) représentant Melpomène d'Ambre, guerrière Seïrdan.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Une plume, des mondes
Publicité
Pages
Archives
Newsletter
Publicité